Nouveaux prêts pour les PFR : un FMI « à visage humain »?
À la fin de juillet, le FMI annonçait un accroissement « sans précédent » des prêts concessionnels (à intérêt réduit) aux pays à faible revenu (PFR) (8 milliards de dollars au cours des deux années à venir; un montant pouvant atteindre 17 milliards de dollars jusqu’à 2014), aucun intérêt sur les prêts nouveaux et existants jusqu’à la fin de 2011, un régime de crédit assoupli et une panoplie nouvelle d’instruments de prêt pour acheminer cette aide accrue (la Facilité élargie de crédit offre un soutien souple à moyen terme; la Facilité de crédit de confirmation répond aux besoins de crédit de précaution à court terme; et la Facilité de crédit rapide offre un soutien d’urgence avec conditionnalité limitée). Le directeur général du FMI Dominique Strauss-Khan a aussi donné l’assurance que ces nouveaux programmes appuieront la réduction de la pauvreté, la croissance économique et la préservation de la protection sociale. Outre les nouvelles ressources prévues, les membres du FMI ont aussi avalisé ce mois-ci une nouvelle allocation de droits de tirage spéciaux (voir « Entente », dans ce numéro).
Cependant, un groupe d’organismes de la société civile (OSC) – ActionAid, Third World Network, Eurodad et le Bretton Woods Project – s’est demandé ce qu’apporteront vraiment ces changements. Par exemple, sur les 17 milliards de dollars annoncés par le FMI, 14 milliards devraient provenir de donateurs et très probablement de crédits d’aide existants et non additionnels. Pour sa part, le FMI ne versera que 2,3 milliards, dont un maigre 785 millions de dollars de ses ventes d’or prochaines. Pour ce qui est de l’allégement des intérêts de 0,5 à zéro pour cent sur les nouveaux prêts et les prêts existants jusqu’à la fin de 2011, cette mesure ne libérera que 110 millions de dollars au cours des deux prochaines années et demie, ce qui équivaut essentiellement à un allégement de 1 million de dollars par PFR par année. Les OSC soutiennent également que les nouvelles facilités n’ont de nouveau que le nom et que les PFR devront sans doute continuer à réduire leurs dépenses, leurs taux d’inflation et leurs déficits.
Le FMI annonce un accroissement sans précédent du soutien financier aux pays les plus pauvres
http://www.imf.org/external/french/np/sec/pr/2009/pr09268f.htm
IMF Financial Package for Low-Income Countries: Much Ado About Nothing?, ActionAid, Bretton Woods Project, Eurodad, TWN, http://www.brettonwoodsproject.org/art.shtml?x=565055
L’IH signale à EDC des réformes à apporter à sa politique environnementale
Exportation et développement Canada (EDC) procédera cette année à l’examen de sa politique environnementale et, à cette fin, l’organisme a tenu une consultation publique sur cette politique. Dans ce contexte, l’Initiative d’Halifax a préparé un mémoire contenant un certain nombre de recommandations en vue d’apporter des améliorations (voir Les faits). Mise en place en 2005, la politique environnementale d’EDC régit l’évaluation du risque en matière d’environnement à EDC et définit les processus d’examen environnemental appliqués par EDC à ses divers produits financiers.
Les objectifs de l’examen sont les suivants : clarifier les engagements environnementaux et les processus de l’examen environnemental d’EDC; veiller à ce que les politiques d’EDC soient généralement conformes aux pratiques des organismes de crédit à l’exportation; contrer le phénomène des changements climatiques; indiquer les adaptations à apporter à la politique de divulgation de l’information touchant l’environnement et la responsabilité sociale. Pour guider le processus d’examen, EDC a publié un document de discussion, qui présente les principaux problèmes d’EDC sur le plan environnemental et sur le plan de la divulgation des données et qui comprend un certain nombre de propositions quant aux changements à apporter à la politique environnementale.
Mémoire soumis par l’Initiative d’Halifax (en anglais)
http://www.halifaxinitiative.org/index.php/reports_analysis/1143
Document de discussion d’EDC
http://www.edc.ca/french/docs/Environmental_Policy_Discussion_f.pdf
Entente sur une allocation de 250 G$ aux membres du FMI
Pour la première fois en 28 ans, les membres du Fonds monétaire international ont convenu d’allouer 250 milliards de dollars en droits de tirage spéciaux (DTS) à l’économie mondiale, à la suite d’une promesse faite par le G20 en avril dernier (voir Mise à jour, avril 2009). Instrument de réserve international, les DTS sont aussi la « devise » du FMI. Non seulement ont-ils pour effet d’augmenter automatiquement les réserves en devises étrangères des banques centrales, mais ils ne sont assujettis à aucune des conditions habituelles du FMI. Alloués en fonction de la cote-part des pays au FMI, leur plus importante portion ira aux États-Unis (42,6 G$), tandis que les pays en développement devraient recevoir environ 90 G$. Les pays à faible revenu obtiendront 18 G$ et l’Afrique subsaharienne, 10 G$.
Cette allocation ne pouvait pas arriver à un meilleur moment. Les DTS peuvent être convertis en espèces et servir à accumuler de l’épargne, à financer des projets de développement et des mesures de relance économique ou à rembourser la dette. Mais si les DTS ne portent pas intérêt tant qu’ils font partie de la réserve des pays bénéficiaires, dès qu’ils sont convertis en devises, les pays doivent payer des intérêts aux taux du marché sur l’emprunt de monnaie forte (qu’il s’agisse de yens, de dollars, d’euros ou de livres) jusqu’à ce que ces devises soient reconverties en DTS. Actuellement, les taux d’intérêt du marché sont bas, mais s’ils augmentent, cette conversion en espèces pourrait devenir un fardeau pour les pays en cause. Par conséquent, des groupes de la société civile, tout en accueillant bien la nouvelle, réclament l’application d’un taux d’intérêt fixe ainsi que des frais fixes ou aucuns frais sur la conversion des DTS en espèces, ce qui permettrait aux pays en développement de tirer un meilleur parti de cette ressource.
Techniquement, les pays développés, qui ont reçu des allocations de DTS élevées, peuvent concéder ou prêter ces derniers à des pays qui en ont besoin – la France et le R.-U. ont indiqué une volonté de le faire – mais les détails techniques entourant de tels transferts n’ont pas encore été arrêtés.
Babillard – Ce mois-ci…
- La Société financière internationale prévoit augmenter de 30 pour cent le soutien de la Banque mondiale à l’industrie agricole pour contrer la crise alimentaire mondiale. L’aide de la SFI pour l’exercice 2009 passera à 2 milliards de dollars, de 400 millions qu’elle était en 2004. De nombreux groupes de la société civile dénoncent le versement de cette aide à l’industrie agricole plutôt qu’aux petites exploitations de subsistance durables.
- La mine malgache Ambatovy Nickel/Cobalt, soutenue par Exportation et développement Canada en février 2007, a rencontré un obstacle. Le président Rajoelina, qui a pris le pouvoir en mars à la faveur d’un coup d’état, a indiqué que la certification relative à la mine de 4,5 milliards de dollars ne serait peut-être pas contraignante en vertu de la loi malgache sur les mines et l’investissement. Le projet a déjà connu des dépassements de coûts, des problèmes environnementaux et des déboires financiers.
- Gordon Brown a indiqué que l’agence britannique de développement injectera un nouveau montant de 6 milliards de dollars en santé internationale d’ici 2015 dans divers pays d’Afrique et d’Asie, qui sera affecté à l’aide technique, aux médicaments et à la juste rémunération des médecins et des infirmières. Les nouvelles mesures viseront surtout les enfants et les femmes enceintes.
- Le Canada a augmenté temporairement de 4 milliards de dollars son capital exigible à la Banque interaméricaine de développement (BID), ce qui augmentera de 45 pour cent la capacité de crédit de la BID.
- Le parlement islandais a accepté de rembourser 3,5 milliards de dollars américains au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, à des taux acceptables, soit 4 pour cent du PIB pour la dette britannique et 2 pour cent pour la dette néerlandaise. En juin, l’Islande a été forcée d’emprunter à ces deux pays pour rembourser 300 000 investisseurs britanniques et néerlandais qui avaient subi des pertes financières dans des comptes d’épargne islandais à haut rendement. Jusqu’à la décision intervenue ce mois-ci, les opposants à l’entente s’inquiétaient de l’importante dette publique imposée à l’Islande par l’élite financière du pays, ainsi que des hausses d’impôt et de la réduction des dépenses publiques qui auraient été nécessaires pour rembourser ces dettes.
- Les discussions sur la réforme de la gouvernance du FMI ont abouti à une impasse alors que les administrateurs représentant un grand nombre de pays en développement ont refusé d’accepter toute proposition de changement structurel, tel qu’un Conseil des ministres chargé de superviser la politique (voir Mise à jour, juin 2008), et ce, tant qu’il n’y aura pas un « remaniement substantiel des quotes-parts en faveur des pays à revenu moyen et à faible revenu ». Certains pays ont accusé le directeur général du FMI Dominique Strauss-Khan de faire passer les réformes à la hâte. Pour en savoir plus : http://www.imf.org/external/np/sec/pn/2009/pn0998.htm
- Lors d’une visite en République démocratique du Congo, le président de la Banque mondiale Robert Zoellick a insisté sur l’amélioration de la gouvernance énergétique du pays, tout en annonçant une aide de 430 M$ pour la remise en état des barrages Inga I et II. Ce projet, d’une capacité potentielle de 40 000 mégawatts, serait deux fois plus important que le controversé barrage des Trois Gorges.
Nouvelles publications ce mois-ci
- Special Drawing Rights and the Global Reserve System, fiche d’information, ActionAid, 2009, http://www.actionaid.org/assets/pdf%5CActionAid%20Factsheet-%20Special%2...
Événements à venir
- Réunion des ministres des Finances des pays du G-20, 4 septembre, Londres, Angleterre.
- Réunion des chefs d’État du G-20, 23-24 septembre, Pittsburgh, États-Unis.
- « L’avenir de l’APD canadienne : mise en pratique de la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement », CCCI, 28-30 septembre, Ottawa.
LES FAITS: Politique environnementale d’EDC : réformes requises
Le mémoire soumis par l’Initiative d’Halifax dans le cadre de l’examen de la politique environnementale d’EDC est présenté selon le format défini dans le document de discussion d’EDC. Voici les principales recommandations faites par l’IH :
Les normes environnementales et sociales applicables aux projets
La politique d’examen environnemental d’EDC devrait imposer aux clients d’EDC issus du secteur privé l’obligation de respecter les Critères de performance de la Société financière internationale et ce, pendant toute la durée de leurs projets. Toute dérogation aux Critères de performance devrait être évitée.
Engagement de la collectivité
EDC devrait à tout le moins adopter le critère de large appui de la collectivité établi dans le cadre de la politique de la SFI sur la durabilité sociale et environnementale.
Conditions d’admission et surveillance des projets
EDC devrait exiger des examens environnementaux et sociaux indépendants afin de vérifier les renseignements contenus dans les évaluations et les rapports fournis par le client. Sous réserve des dispositions légales régissant la confidentialité et le secret commercial, EDC devrait divulguer publiquement les plans de correction et de réduction des impacts, de même que les rapports de surveillance, y compris ceux qui sont générés par des experts indépendants.
Changements climatiques
L’objectif de la politique d’EDC à l’égard des changements climatiques devrait être de réduire au minimum les émissions de gaz à effet de serre attribuables à ses clients. EDC devrait viser à atteindre ses objectifs en privilégiant les projets d’exportation et d’investissement peu polluants et en réduisant son soutien aux grands émetteurs de GES. EDC devrait promouvoir l’adoption par l’OCDE d’une politique efficace et contraignante en matière de changements climatiques.
Divulgation
EDC devrait modifier sa politique de divulgation de manière à ce que le consentement de ses clients à divulguer tout renseignement non assujetti aux restrictions sur le secret commercial devienne une condition de son soutien.
Droits de la personne
EDC devrait adopter une politique des droits de la personne offrant une protection contre les atteintes aux droits de la personne par ses clients. Dans le but de garantir le respect du droit d’accès à l’information et de promouvoir la reddition de comptes, la politique de divulgation d’EDC devrait être modifiée de manière à assurer la diffusion publique des politiques et procédures relatives aux droits de la personne d’EDC ainsi que les données spécifiques aux projets en matière de droits de la personne.