Mise à jour - le 30 janvier 2009

L’Europe veut tenir le haut du pavé pour répondre à la crise financière
Un avertissement envers l’opposition américaine (et canadienne ?) à une nouvelle architecture internationale des institutions et à une réglementation plus sévère pour une forme de gestion plus « morale » du capitalisme, un Conseil Économique plus souple au sein des Nations Unies, et une charte pour une économie durable établissant les règles d’une gouvernance financière mondiale, constituent trois des thèmes clés soulevés par la Chancelière allemande Angela Merckel et le Président français Nicolas Sarkosy, lors du Symposium organisé au plus haut niveau par Nicolas Sarkosy et l’ancien Premier Ministre britannique Tony Blair, ce mois-ci à Paris.

L’objectif de la rencontre, qui a rassemblé responsables des politiques, économistes, syndicalistes et chefs de file du monde des affaires, était de travailler sur les réflexions de personnes telles que Joseph Stiglitz, Amartya Sen et Francis Fukayama, sur les trois problématiques clés suivantes : les principes devant guider un capitalisme plus responsable et plus éthique; les points faibles des institutions (y compris l’État) qui ont besoin d’être renforcés et les mécanismes qui doivent être établis pour assurer une distribution plus équitable des bénéfices de la mondialisation à la fois entre les États et au sein des États; les renforcements nécessaires de la réglementation du marché et leur mise en application de la façon la plus efficace possible.

Bien que N. Sarkosy et A. Merckel souhaitent que l’Europe mène tambour battant le prochain sommet du G-20, il se peut qu’íls soient obligés de laisser leurs ambitions au vestiaire. Dans une lettre ouverte aux ministres des finances du G-20, les priorités du Royaume-Uni pour le sommet d’avril ressemblent à une série de mesures visant davantage à réparer l’éclatement des marchés financiers qu’à repenser les fondements d’un « nouveau monde, nouveau capitalisme », et qui consistent, selon la citation d’un critique, à « rafistoler le bateau et à repartir à fond les gaz ! ».


« Nouveau monde, nouveau capitalisme, Éthique, développement, régulation
http://www.colloquenouveaumonde.fr/home/

Objectifs du Royaume-Uni pour le G-20 en 2009,
http://www.hm-treasury.gov.uk/d/g20_ukobjectives_080109.pdf


La Banque mondiale en quête d’un fonds spécial pour les pauvres
Le président de la Banque mondiale Robert Zoellick demande instamment à Barack Obama de soutenir les pays qui ne peuvent renflouer leur déficit, en transférant 0,7 % (6 milliards $) du plan de relance américain récemment approuvé sur un nouveau « Fonds de vulnérabilité ». Dans les pages éditoriales et d’opinions du New-York Times, R. Zoellick est d’avis que ce fonds, qui vise à protéger de la crise économique mondiale les pauvres au niveau de la planète, aura aussi des retombées économiques aux États-Unis, puisque la hausse des dépenses en infrastructures dans les pays en voie de développement augmentera la demande en biens de fabrication américaine.

R. Zoellick espère que les autres nations occidentales suivront Barack Obama et engageront des fonds lors du sommet du G-20 à Londres. Le président de la Banque mondiale propose d’utiliser le fonds pour soutenir les programmes de protection de revenus, les infrastructures, les microcrédits, et les petites et moyennes entreprises.

Il ne fait aucun doute que les pays en voie de développement ont besoin d’aides supplémentaires. La question qu’il reste à éclaircir est de savoir si la proposition de R. Zoellick est saine, à savoir que le Fonds soit administré par la Banque mondiale, l’ONU et les banques régionales de développement. Bien que R. Zoellick s’engage à fournir « une aide souple et rapide, accompagnée de mesures de sauvegarde garantissant que le fonds est dûment dépensé », le bilan de la Banque en prestations d’aides et l’impact dévastateur de certaines actions entreprises par le passé invitent au scepticisme quant à ses déclarations.


Un Plan de relance pour le monde, 22 janvier 2009, New-York Times Op-Ed
http://www.nytimes.com/2009/01/23/opinion/23zoellick.html
L’ONU va de l’avant avec ses plans pour faire face à la crise financière
Refusant d’être mis hors jeu du processus du G-20, le Président de l’assemblée générale des Nations Unies, Miguel d’Escoto, a organisé ce mois-ci la première rencontre de sa Commission d’Experts (voir babillard du mois dernier). Il a annoncé une période de consultation avec la société civile et la Commission, ainsi que les modalités et le calendrier de la Conférence des Nations Unies sur la Crise économique et financière mondiale et ses répercussions sur le développement. La Conférence de l’ONU a constitué l’un des résultats clés de la rencontre sur le Financement pour le développement le mois dernier (voir le bulletin Mise à jour de décembre 2008).

Le premier rapport de la Commission d’Experts aborde les répercussions de l’échec des politiques et pratiques élaborées dans le Nord et affligeant le Sud, l’incapacité totale des pays en voie de développement de fournir des aides de renflouement similaires à celles que débloquent l’Europe ou les États-Unis, ainsi que la nécessité de financements immédiats et substantiels (toujours grâce au FMI mais en dehors des conditions « habituelles ») qui permettent aux pays du Sud d’entreprendre des politiques contracycliques comparables, de stimuler leur économie, de mettre en place des mesures de protection sociale et de garantir une liquidité pour leur commerce. Ce rapport demande également une plus grande transparence financière du marché et l’aboutissement des négociations commerciales du Cycle de Doha.

De nombreux groupes de la société civile, se demandant où étaient passées les propositions de réformes élargies et plus radicales du système monétaire et financier international, ont réagi sans beaucoup d’enthousiasme.


Commission d’Experts de l’ONU.  Consultations avec la société civile, 26 janvier -13 février 
http://www.un-ngls.org/cfr
Babillard – Ce mois-ci…
  • La Banque mondiale a réuni 350 millions $ en « obligations vertes » provenant d’investisseurs scandinaves. Ces fonds sont destinés à la rénovation de centrales électriques et de lignes de transmission (afin de réduire les gaz à effet de serre) et à des projets d’implantation de centrales solaires et éoliennes, de gazéification du charbon, de capture et stockage du CO2 et du méthane. Ces obligations viennent à échéance dans 6 ans et rapportent un intérêt annuel de 3,15 %.
  • Après la Géorgie, la Hongrie, l’Ukraine et la Lettonie, le Belarus est le cinquième pays de l’Europe de l’Est ou centrale à négocier, ces deux derniers mois, un prêt d’urgence (de 2,46 milliards $) avec le FMI. Ce prêt est devenu indispensable étant donné que les subventions russes et les exportations du Belarus avaient diminué ces dernières années. Par ailleurs, le Belarus pourrait dévaluer son rouble de 20 %, augmenter ses taux d’intérêts, couper dans les dépenses publiques, geler les salaires du secteur public et augmenter les tarifs des services publics. 
  • La Banque mondiale a exclu sept compagnies, dont deux définitivement, ainsi qu’un individu qui ne pourront plus soumissionner pour les futurs contrats de la Banque. Ces sanctions suivent une enquête menée par le Vice-président à l’Intégrité de la Banque qui a dévoilé des preuves de collusion au sein d’un cartel de firmes locales et internationales soumissionnant pour la première phase du Programme de gestion et d’amélioration du réseau routier national des Philippines. Sur les 33 millions $ de l’offre de la Banque pour le programme routier, aucune des compagnies exclues ne s’est vu attribuer de montant. En novembre 2007, les directeurs exécutifs de la Banque mondiale ont mis leur veto sur un nouveau prêt de 232 millions $ pour ce même projet routier aux Philippines, car les enquêteurs de la Banque avaient confirmé que le projet faisait l’objet d’un truquage d’offres.
  • Dans son nouveau budget, le gouvernement canadien a fait remarquer que son plan fiscal de relance de 40 milliards $, soit 1,9 % du PIB, respectait les engagements pris lors du récent sommet du G-20 (voir la Mise à jour de novembre 2008), puisque le FMI suggérait un plan de relance de 2 % du PIB. Bien que la portée de la relance dépende en dernier lieu de la capacité des municipalités et des individus à injecter une partie des sommes pour profiter de certains programmes (capacité que de nombreux critiques remettent en question), le FMI a soulevé un spectre plus pessimiste : les projections de croissance économique du ministre Flaherty. Le FMI et M. Flaherty ont prévu une baisse de 1,2 % cette année. Mais le budget de Flaherty compte sur une croissance de 2,4 % l’année prochaine, alors que le FMI anticipe une hausse de 1,6 %. Il serait peut-être judicieux d’équilibrer les comptes d’ici 2013-2014.

Nouvelles publications du mois
  • « Flux financiers illicites sortant des pays en voie de développement : 2002-2006 », Intégrité financière mondiale, décembre 2008. Analyse complète et évaluation de la façon dont l’argent sort des pays en voie de développement par des activités illicites et du montant de ces sommes (1 billion $ par an !) http://www.gfip.org/storage/gfip/executive%20-%20final%20version%201-5-09.pdf

Événements à venir
  • Rencontre des ministres des finances à Rome, Italie, les 13 et 14 février 2009.
  • Rencontre des observateurs Euro-IFI à Bruxelles, Belgique, les 16 et 17 février 2009.

LES FAITS : Calendrier d’événements 2009 : la crise financière mondiale
1er janvier L’Italie prend la présidence du Groupe des Huit (G8)
http://www.g8italia2009.it
5-6 janvier  1ère session plénière de la Commission d’Experts de l’ONU sur la crise financière
http://www.un.org/ga/president/63/commission/financial_commission.shtml
9-10 mars 2e session plénière de la Commission d’Experts (Genève)
14 mars Réunion des ministres des Finances du G-20 (Londres)
25-27 mars    Dialogue interactif thématique de l’Assemblée générale sur la Crise économique et ses répercussions sur le développement
28 mars Mobilisation de masse au G-20 pour « Emplois, justice et climat » (Londres)
2 avril    Sommet des chefs d’États du G-20 (Londres)
http://www.hm-treasury.gov.uk/d/managingtheglobaleconomy_081208.pdf
6 avril Ébauche du document présentant les résultats de la Conférence de l’ONU sur la Crise économique et financière mondiale et ses répercussions sur le développement. Les négociations intergouvernementales sur ce document débuteront le 13 avril.
17-19 avril   Ve Sommet des Amériques (Trinidad et Tobago)
http://www.summit-americas.org/
25-26 avril  Réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI (Washington DC). Un dialogue interactif entre ECOSOC/CNUCED/ Banque mondiale/FMI/OMC suivra le 27 ou le 28 avril.
Mi-mai  Publication du rapport final de la Commission d’Experts de l’ONU
May 26-29 Conférence de l’ONU sur la Crise économique et financière mondiale et ses répercussions sur le développement (New York)
12-13 juin Réunion des ministres des Finances du G-7 (Venise, Italie)
8-10 juillet Sommet du G-8 (La Maddalena, Italie)
15 septembre Début de la 64e session de l’Assemblée générale des Nations Unies (New York)
6-7 octobre Assemblée annuelle de la Banque mondiale et du FMI (Istanbul, Turquie)
Novembre Réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth (Trinidad et Tobago)
17 Novembre Réunion des ministres des Finances du G-20 (Royaume-Uni)
7 décembre Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (Copenhague, Danemark)

Une chronologie plus détaillée des événements et un calendrier des activités sont disponibles en ligne sur :
http://www.halifaxinitiative.org/index.php/evenements_courants