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Quinzième reconstitution des ressources de l’Association internationale de développement : Encore un petit effort!
Qu’est-ce que l’IDA?
L’Association internationale de développement (IDA) et la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) constituent la Banque mondiale. Créée en 1960, l’IDA vise à stimuler la croissance économique, réduire la pauvreté et améliorer les conditions de vie des populations. Les prêts accordés par l’IDA financent des opérations en faveur de l’éducation primaire, des services de santé de base, des services d’assainissement et d’approvisionnement en eau propre, des infrastructures et des réformes institutionnelles. Alors que l’IDA accorde des dons et des prêts à long terme très concessionnels aux pays les plus démunis ou à faible revenu, la BIRD fournit aux pays à revenu intermédiaire des services de conseil et des capitaux pour financer leurs dépenses d’équipement. Fin 2006, l’Association avait accordé 161 milliards de dollars en dons et crédits à conditions concessionnelles à 108 pays .
Quels sont les pays emprunteurs de l’IDA?
Trois catégories de pays peuvent bénéficier des ressources de l’assistance de l’Association :
- Les pays dont la pauvreté relative, soit le revenu national brut (RNB) par habitant, est inférieure à un seuil prédéfini et actualisé chaque année (1 025 dollars pour l’exercice 2007);
- Les pays dont la qualité de la signature reste insuffisante pour pouvoir emprunter à la BIRD même s’ils affichent un RNB par habitant supérieur au plafond d’accès opérationnel aux ressources de l’IDA. Les pays dont le RNB dépasse durant plus de deux années consécutives le seuil de pauvreté relative font face à des conditions de remboursement accélérées ou durcies;
- Les pays mixtes sont ceux qui, tout en étant admis à bénéficier du concours de l’IDA compte tenu de leur revenu par habitant, ont par ailleurs une signature d’une qualité suffisante pour pouvoir emprunter dans une certaine mesure à la BIRD.
Près de la moitié des pays bénéficiaires de l’assistance de l’IDA se trouvent en Afrique. En 2006, le Pakistan, le Vietnam, la Tanzanie, l’Éthiopie et l’Inde étaient les cinq plus gros emprunteurs de l’IDA.
Quels sont les critères d’affectation des crédits?
Les crédits de l’IDA sont allouées aux pays emprunteurs en fonction de trois critères : la pauvreté relative, les bons principes de gestion économique, déterminés comme étant la mise en œuvre des mesures économiques et sociales en faveur de la croissance et de la réduction de la pauvreté, et le degré d’endettement tolérable.
D’où provient le financement de l’IDA?
Si la BIRD mobilise l’essentiel de ses ressources sur les marchés internationaux des capitaux, l’IDA dépend en grande partie des contributions des plus riches de ses pays membres pour son financement. Elle tire des ressources supplémentaires des transferts de revenu de la BIRD et de la Société financière internationale (SFI) et des remboursements de ses crédits antérieurs effectués par les pays emprunteurs. Les pays donateurs se réunissent tous les trois ans pour reconstituer les ressources de l’IDA. Lors de la dernière reconstitution, quatorzième de la série, les contributions des donateurs ont atteint 18 milliards de dollars, soit plus de la moitié de l’enveloppe d’IDA-14 qui s’est montée à 33 milliards de dollars. Parmi les quarante pays contributeurs, les pays du Groupe des Sept (G7) et la Suède ont fourni 66,2 % du total. Le Canada verse à l’IDA 318,27 millions de dollars canadiens par an, soit le dixième du budget qu’il consacre à l’assistance internationale. La dernière reconstitution prendra fin en juin 2008.
La reconstitution des ressources de l’IDA : un regard rétrospectif sur l’IDA-14
Le processus de reconstitution des ressources ne permet pas seulement de fixer le montant des engagements financiers des pays donateurs mais c’est aussi l’occasion pour eux de définir la manière dont les fonds seront dépensés . Les représentants de quarante pays donateurs, appelés « délégués de l’IDA », ont, au cours des négociations passées, établi le cadre politique, opérationnel et financier (« les conditions ») des prêts à venir. Ainsi, les processus de reconstitution suivants tiennent compte des décisions antérieures. Il s’ensuit que l’IDA-14 a déjà planté le décor de la quinzième reconstitution.
- Dans le cadre de l’IDA-14, les donateurs se sont engagés à « travailler ensemble pour atteindre les Objectifs de développement pour le millénaire ». À ce titre, ils ont mis en exergue le rôle de l’IDA dans l’élargissement de l’accès aux infrastructures pour permettre aux pays bénéficiaires de réaliser une croissance économique vigoureuse et d’atteindre les Objectifs de développement pour le millénaire. Ils ont aussi insisté sur la nécessité d’investir directement dans les projets qui donneront aux communautés défavorisées l’accès à l’eau potable, des moyens de communication adéquats et un approvisionnement en électricité fiable.
- Ils ont aussi insisté sur la nécessité que l’IDA favorise l’instauration d’un climat plus favorable aux investissements privés dans les pays pauvres, et lui ont demandé de faire preuve de créativité pour promouvoir l’esprit d’entreprise et la vigueur du secteur privé national.
- Les pays donateurs ont aussi proposé de placer les résultats au centre des programmes pour mesurer les progrès réalisés en matière d’Objectifs de développement pour le millénaire et d’évaluer l’impact des programmes et projets de l’IDA. En outre, les pays donateurs ont recommandé que la Banque aide les pays concernés à adopter des stratégies leur permettant de se doter des capacités statistiques nationales pour évaluer les résultats.
- Les discussions se sont aussi axées sur une nouvelle allocation des ressources basée sur les performances de chaque pays. Contrairement aux Documents de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) dont l’élaboration est prise en main par les pays et qui constituent la base sur laquelle se fonde l’assistance de l’IDA, l’allocation basée sur les performances assigne à chaque pays une cote qui détermine le volume des ressources qui lui seront accordées. L’allocation basée sur les performances est une moyenne pondérée du score réalisé à l’Évaluation de la politique et des institutions nationales, EPIN, dont le poids est de 80 % (voir encadré), et de la mesure de la performance du portefeuille actif de projets du pays emprunteur dont le poids est de 20 %. Cette note est ensuite revue à la hausse ou à la baisse à la lumière de la performance en matière de gouvernance. Enfin, vient s’ajouter l’évaluation de la pauvreté relative qui permet de déterminer l’enveloppe globale.
- Une fois l’enveloppe globale déterminée, le degré d’affectation des dons est établi en fonction du niveau de risque estimé grâce au nouveau cadre de viabilité de la dette. En d’autres termes, les pays les moins endettés donc à faible niveau de risque obtiennent un « feu vert » soit des crédits à conditions concessionnelles; en revanche, les pays à risque élevé obtiennent un « feu rouge » soit une assistance uniquement sous forme de dons. Enfin, les pays à risque moyen obtiennent un « feu jaune » et reçoivent dons et crédits à parts égales. Ceci étant, 20 % du montant global des dons sont retenus et une partie, soit 11 %, réallouée, toujours selon le barème inspiré du système des feux tricolores, et versée ultérieurement pour récompenser les pays ayant adopté de bonnes politiques. Les neuf pour cent restants sont retenus au titre des « frais administratifs ». Le montant de ces frais est ensuite prêté à taux de faveur aux pays dits « mixtes »; les recettes permettent de compenser la perte de remboursement de capital et de revenu d’intérêt de l’IDA.
- Enfin, thème récurrent des débats de la Banque, les donateurs ont insisté sur le fait que le développement exige des partenariats plus forts entre les bailleurs de fonds et les pays bénéficiaires de l’aide et une coordination plus adéquate de l’aide internationale au développement. L’IDA a été priée d’harmoniser les politiques et les programmes en matière de développement et d’accroître de ce fait l’efficacité et l’impact de l’aide accordée.
Au cours de la quatorzième reconstitution des ressources, les organisations de la société civile du Canada avaient mis l’accent sur un certain nombre de questions, notamment, le fait que le degré d’endettement tolérable est un critère qui privilégie une croissance basée sur les exportations au détriment des stratégies de croissance axées sur les besoins internes, la difficulté d’investir dans les zones de conflit, l’absence quasi-totale de critères environnementaux dans l’EPIN, l’équivalence brutale entre EPIN et progrès, le manque de ventilation des critères de classement par pays et la nécessité de rendre le processus d’évaluation plus transparent.
L’évaluation de la politique et des institutions nationales (EPIN)
L’EPIN sert à mesurer la performance des politiques et des institutions nationales en matière de promotion de la croissance et de réduction de la pauvreté. Les seize critères de performance sont classés en quatre grappes ayant un coefficient égal. Les politiques sont notées sur une échelle de un à six, où six représente la note maximale : (i) Gestion économique (gestion macro-économique; politique fiscale; politique d’endettement); L’EPIN a été l’objet de critiques à plus d’un égard. D’abord, la performance d’un pays est jugée en fonction d’indicateurs établis par la Banque, sur des données produites par la Banque et à partir d’évaluations effectuées par le personnel de la Banque. Il s’ensuit que l’EPIN est le reflet de la philosophie néolibérale de la Banque dont on sait le désastreux impact socio-économique et environnemental dans plus d’un pays. Ensuite, noter les politiques et institutions nationales en se servant d’un nombre réduit de critères est en soi un exercice subjectif qui laisse une marge d’erreur importante. Enfin, ce n’est qu’en 2006 que la notation des pays bénéficiaires de l’assistance de l’IDA a été rendue publique. Celle des pays à revenu intermédiaire ne l’est toujours pas. « The World Bank policy scorecard: The new conditionality? », |
IDA-15 – Encore un petit effort!
Les 5 et 6 mars 2007, les représentants des pays donateurs se sont rassemblés à Paris dans le cadre de la première réunion d’une longue année de rencontres pour débattre de la manière de renflouer les coffres de l’IDA. Parmi les onze thèmes proposés par seize des quarante pays représentés, les délégués à l’IDA en ont choisi trois :
- Place de l’IDA dans l’architecture de l’aide : Quelle est la place de l’IDA dans un paysage qui se caractérise par la multiplication des bailleurs de fonds publics (assistance bilatérale comme celle de la Chine) et privés (Fondation Gates) aux intérêts aussi divers que variés? Dans quelle mesure l’IDA peut-elle accroître l’efficacité de sa contribution et harmoniser ses efforts avec ceux d’autres donateurs dans un cadre en pleine mutation, que ce soit en tant que chef de file, suiveur ou bouche-trou? Quels sont les outils dont l’IDA doit se doter pour atteindre ces objectifs?
- Assistance aux états fragiles ou sortant d’un conflit : Quel est le volume de l’aide à apporter aux états fragiles? Quel type de critères systématiques doivent être établis pour accorder une nouvelle aide aux pays accusant un retard de paiement? Comment la Banque devrait-elle se positionner dans les pays sortant d’un conflit (par exemple, par le biais des fonds d’affectation multi-donateurs) face à d’autres acteurs multilatéraux comme les Nations Unies?
- Évaluation de l’efficacité de l’aide par pays (résultats de l’IDA par pays; système d’allocation des ressources) : Quel est l’impact réel de l’assistance de l’IDA? Dans quelle mesure l’évaluation des résultats de l’IDA est-elle fiable? Quelles modifications doivent être introduites dans la méthodologie d’évaluation des « besoins » d’un pays? Comment améliorer le système d’allocation des ressources basée sur les performances en tenant compte de l’EPIN, du facteur de gouvernance et du cadre d’endettement tolérable?
Pour sa part, le Canada avait proposé à la réunion de mars dernier à Paris que le débat s’articule autour des trois questions suivantes : adaptation des outils opérationnels et financiers de l’IDA à la situation des états fragiles; évaluation des résultats des programmes de l’IDA et création de capacités statistiques nationales pour recueillir les données nécessaires à cet exercice; gestion de la viabilité de la dette dans le cadre des nouveaux crédits, qui serait discutée, selon le Canada, au titre de l’évaluation de l’efficacité de l’aide par pays.
Des réunions consacrées à l’architecture de l’aide et à l’assistance aux états fragiles se sont tenues au Mozambique du 28 au 30 juin. Le débat devrait se poursuivre lors de la rencontre de Washington du 23 octobre prochain. Il devrait tourner autour de la viabilité de la dette, la simplification de l’EPIN, l’examen des procédures de vérification interne de l’IDA. Il est aussi prévu que les délégués de l’IDA tiennent leur première rencontre avec Robert Zoellick, le nouveau président de la Banque. Une ultime rencontre est aussi prévue à titre provisoire pour les 12 et 13 novembre à Dublin; la conférence d’annonce de contributions devrait aussi tenir ses assises les 13 et 14 décembre à Berlin. On prévoit que le rapport annuel sur les règles de conditionnalité de la Banque et la mise en œuvre des « principes de bonne pratique », à paraître fin octobre, alimente les discussions à Dublin.
Où est l’argent?
Une fois le cadre général de la nouvelle reconstitution établi, il faudra mesurer l’engagement des pays donateurs. À l’issue du Sommet de Gleneagles qui avait adopté l’initiative d'allégement de la dette multilatérale, les chefs des pays du G8 avaient promis « de verser des contributions supplémentaires à l’IDA, de manière à compenser dollar pour dollar le capital et les intérêts auxquels il est renoncé au moyen de l’annulation de la dette ». En clair, les donateurs s’engageront à apporter « des contributions en sus des reconstitutions périodiques des ressources de l’IDA » pour éponger les pertes liées à l’annulation de la dette . Il s’ensuit que pour cette quinzième reconstitution de ressources, la Banque s’attend à recevoir une enveloppe de contributions se chiffrant à 26,4 milliards de dollars.
Selon les premières indications, l’IDA n’obtiendrait pas pour la prochaine reconstitution d’une durée de trois ans l’augmentation de 20 % par rapport au cycle précédent que la Banque réclame aux bailleurs de fonds. En dépit des promesses faites dans le cadre du G8 à Gleneagles, de nombreux pays font marche arrière, prenant pour prétexte les contraintes budgétaires nationales, la perception d’inefficacité de la Banque et les tensions héritées de l’ère Wolfowitz. D’ores et déjà, l’Europe, les États-Unis et le Japon ont annoncé qu’ils pourraient réduire leur contribution ou rechercher des canaux de substitution; pour sa part, le Canada envisage de remplir les objectifs de la Banque. Alors que les délégués de l’IDA doivent rencontrer le Président de la Banque ce mois à Washington, celui-ci a annoncé que la BIRD et la SFI verseraient une contribution de 3,5 milliards de dollars à l’IDA au cours du prochain cycle.