Mythes et réalités concernant l'allègement de la dette

Mythes et r�alit�s concernant l�all�gement de la dette

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Un article publi� dans le journal The Guardian en novembre 1998 sous la signature de Jack Boorman, directeur du d�veloppement et de la r�vision des politiques du Fonds mon�taire international, propageait quatre � mythes � concernant l�all�gement de la dette des pays pauvres tr�s endett�s. L�objectif de l�information qui suit est de dissiper les faux arguments entretenus par le FMI sur cette question.

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Tout en emp�chant ou en r�duisant � l�extr�me les all�gements de dettes possibles dans le cadre de l�Initiative HIPC (� Initiative concernant la dette des pays pauvres tr�s endett�s �), le FMI se sert de ce programme pour accro�tre son pouvoir sur l��conomie et les politiques des pays en cause. Par surcro�t, il fabrique et propage des mythes pour justifier ses actions...

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Mythe no 1. � La pauvret� n�est pas due � la dette.

R�alit�...

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En fait, le probl�me de l�endettement est le principal obstacle � la r�duction de la pauvret�.

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Bien que la pauvret� repose sur des causes nombreuses et complexes, l�endettement des �tats est de loin le plus important obstacle � franchir pour l�enrayer. Les faits parlent par eux-m�mes : pour chaque dollar d�aide et de subvention re�u en 1998, l�Afrique subsaharienne a vers� 1,41 $ au service de la dette.

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En affirmant que � les principales causes de la pauvret� sont les politiques �conomiques inad�quates, les mauvaises d�cisions de cr�dit et la d�sorganisation politique �, les responsables du FMI reconnaissaient le r�le de l�endettement comme cause de la pauvret�. Or, pour solutionner le probl�me, leur r�action a �t� de r�clamer � l�am�lioration � des politiques nationales, en �vitant du m�me souffle de prendre concr�tement leurs responsabilit�s face � ces pr�ts inconsid�r�s dont ils reconnaissaient l�existence.

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La Banque Mondiale et le FMI en faute

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Pendant les ann�es 70, la Banque Mondiale et le FMI ont accord� des pr�ts sans retenue et sans discernement en raison d�une valorisation du cr�dit faisant suite � l�abondance des eurodevises. Pendant ce temps, les politiques mon�taires inflationnistes des �tats-Unis entra�naient une hausse des taux d�int�r�t ainsi qu�une chute du prix des marchandises. Dans ce contexte, la Banque Mondiale a augment� de cinq cents pour cent ses pr�ts aux pays en d�veloppement, tout en encourageant les banques priv�es et les gouvernements des pays du Nord � accro�tre eux aussi leur cr�dit. Ces pr�ts �taient souvent consentis � des r�gimes ill�gitimes, � des fins frauduleuses ou pour des projets inopportuns et mal g�r�s.

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Les pauvres sont donc maintenant oblig�s de payer pour ces pratiques de cr�dit irresponsables (auxquelles ils n�ont pas consenti et dont ils ne b�n�ficient que rarement) par des compressions dans les d�penses d��ducation et de sant�, et par des r�ductions de leur niveau de vie et de leur bien-�tre physique. *Voir exemple de mauvaise pratique de cr�dit au verso.

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Mauvaises pratiques de cr�dit

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En 1988, la dette du Br�sil avait atteint 121 milliards de dollars. Voici o� est all� cet argent :

  • 16,6 milliards $ ont fait l�objet de pr�ts garantis par l��tat � des compagnies multinationales pour la r�alisation de vastes � projets de d�veloppement � industriels et d�infrastructures, dont un grand nombre sont rest�s inachev�s;

  • 18 � 20 milliards $ ne sont jamais entr�s au pays, mais ont �t� d�pos�s dans des banques suisses par une �lite locale fortun�e et pr�occup�e par la stabilit� �conomique et politique du pays;

  • 41 milliards $ ont d� �tre appliqu�s � l�augmentation des co�ts d�importation dus � la d�valuation de la monnaie br�silienne (impos�e par le FMI comme condition � l�octroi de nouveaux cr�dits);

  • 34 milliards $ ont �t� d�pens�s pour r�pondre � l�augmentation spectaculaire des taux d�int�r�t impos�s par les banques centrales des pays industrialis�s.

Mythe no 2.� Les paiements reli�s � la dette ne se traduisent pas par des d�penses insuffisantes dans le domaine social.

R�alit�...

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L�Afrique consacre deux fois plus d�argent au service de la dette qu�aux soins de sant� de base.

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En 1994, la Zambie a vers� trente fois plus pour le remboursement de sa dette qu�� l��ducation. Des �tudes de pauvret� r�alis�es par la Banque Mondiale elle-m�me conviennent que � d�importantes diminutions de la fr�quentation scolaire ont �t� observ�es, de fa�on beaucoup plus marqu�e chez les filles �. Entre 1989 et 1993, la Zambie a effectu� un transfert net de 180 millions $ � l�avantage du FMI.

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Au Nicaragua, le remboursement de la dette correspond � plus du tiers des d�penses de l��tat, soit deux fois plus que le montant consacr� � l��ducation et � l�approvisionnement en eau potable.

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Contrairement � la croyance g�n�rale � l�effet que l�Afrique ne rembourse pas ses dettes, les pays d�Afrique subsaharienne ont consacr� un total de 101 milliards $ au service de la dette entre 1982 et 1992. Le total vers� par l�ensemble de l�Afrique pendant la m�me p�riode �tait de 240 milliards $. Le service de la dette d�tourne les ressources des �tats des besoins des populations locales et ce, sur une vaste �chelle, privant les Africains du droit � une alimentation, � des soins de sant� et � une �ducation ad�quates.

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Les dettes des pays d�Afrique subsaharienne envers la Banque Mondiale repr�sentent actuellement plus de 36 milliards $, soit pr�s de 20 pour cent de l�ensemble de leur dette.

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Moins d�un tiers de la facture du service de la dette de l�Afrique suffirait � financer les co�ts additionnels des programmes n�cessaires pour r�pondre aux principaux objectifs du secteur social d�finis par le Sommet mondial pour les enfants en 1990.

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Mythe no 3. L�effacement de la dette causerait plus de probl�mes qu�il n�en r�soudrait.

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R�alit�...

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Ce curieux argument repose sur l�hypoth�se selon laquelle � une annulation inconditionnelle de la dette risquerait de se traduire par une dilapidation des fonds lib�r�s �, ce qui entra�nerait une diminution des volumes d�aide. Cette opinion repose sur deux grands postulats selon lesquels : 1) il serait pr�f�rable de faire sortir l�argent du pays en paiement de la dette de l��tat que de le laisser aux mains des gouvernements locaux; 2) le FMI serait l�unique instance autoris�e � permettre ou � refuser un all�gement de dette et la seule habilit�e � surveiller l�affectation des sommes lib�r�es.

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Fort de ces convictions, le FMI a refus� d�effacer la moindre dette... Et le probl�me n�a cess� de s�amplifier et de s�aggraver, causant de plus en plus de dommages � mesure que les ann�es passent. Ainsi :

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Entre 1980 et 1987, le transfert net de ressources des pays moins d�velopp�s vers leur cr�anciers s�est �lev� � 287 milliards $US.

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Bien que l�Am�rique latine et les Cara�bes aient vers� 150 milliards $US de plus pour le service de la dette qu�ils n�ont re�u en nouveaux cr�dits entre 1982 et 1987, leur dette totale s�est n�anmoins accrue, passant de 330 milliards � 410 milliards $US.

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La position arrogante adopt�e par le FMI met en cause les notions fondamentales de gouvernement repr�sentatif et de souverainet� des �tats. Le FMI trahit ainsi notre confiance dans les forces et les valeurs inh�rentes aux syst�mes d�mocratiques, en se pla�ant � bien qu�il ne soit en fait qu�une bureaucratie technocratique non �lue � en position d�autorit� par rapport aux �tats nationaux. Les pays riches �clateraient d�indignation si le FMI se comportait ainsi envers eux.

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Mythe no 4. L�Initiative HIPC offre � certains pays un all�gement rapide de leur dette.

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R�alit�...

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L�Initiative HIPC a �t� lanc�e � l�automne 1996. Jusqu�ici, sept pays seulement ont �t� admis au programme d�all�gement de la dette, sur les douze soumis � l�examen (sur 41 � pays pauvres tr�s endett�s �). Ces pays doivent se soumettre � plusieurs ann�es de r�forme �conomique, sous la direction du FMI, avant d�atteindre le point final du programme de l�Initiative HIPC. Deux pays seulement ont termin� le programme jusqu�� maintenant.

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Lorsque le programme a d�but�, 25 pays devaient faire l�objet d�une d�cision avant la fin de l�an 2000, et 15 pays �taient susceptibles d��tre admis. Pour ceux-ci, le programme devait se terminer trois ans plus tard. Or le tiers de ces pays ont d�j� vu leur date de d�cision repouss�e, sous pr�texte de � d�calages � dans leurs programmes de restructuration �conomique ou, dans quelques cas, en raison de conflits arm�s.

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Le personnel de la Banque Mondiale et du FMI all�gue qu�en effa�ant la dette de certains pays de fa�on rapide et globale, d�ici l�an 2000, par exemple, � les bonnes intentions risqueraient d��tre frustr�es devant l�inefficacit� de l�utilisation des �conomies d�coulant de l�all�gement de la dette �. Ce qu�il faut comprendre, c�est qu�en accordant un all�gement de dette trop rapide aux pays pauvres tr�s endett�s, le FMI perdrait un moyen de contr�ler leur �conomie interne. Comme le d�clarait un repr�sentant du FMI, � une fois que vous avez annul� la dette, il ne vous reste plus aucune prise �.

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Le fait de pr�senter l�all�gement de la dette comme une r�compense � adjuger, plut�t qu�une n�cessit� �conomique et sociale, constitue une tentative �vidente de la part du FMI et de la Banque Mondiale de d�tourner une situation p�nible � leur propre avantage.

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En fait, on peut douter de l�importance des ressources qui seront lib�r�es par l�Initiative HIPC. Des sept pays admis au programme, aucun ne peut s�attendre � obtenir une diminution de ses paiements de dette, tandis que six d�entre eux continueront de voir augmenter les leurs. Un rapport d�examen interne r�alis� par le personnel de l�Initiative HIPC en avril 1999 mentionnait d�ailleurs que � l�Initiative HIPC ne r�duira peut-�tre pas le service de la dette de fa�on significative par rapport aux niveaux de paiement actuels �.

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Documentation disponible aupr�s du Comit� pour la Justice sociale de Montr�al