Mise à jour - le 31 janvier 2010

Des OSC réclament une approche commune renouvelée
Les membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sont actuellement en processus de révision d’une Recommandation du conseil adoptée en 2007 portant sur les opérations des organismes de crédit à l’exportation (OCE). La Recommandation du conseil sur des approches communes concernant l’environnement et les crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public (Approches communes) est un gentlemen’s agreement qui vise à établir des règles du jeu équitables quant aux pratiques environnementales des OCE. Des organismes de la société civile allèguent que l’impact de cette recommandation est affaibli par l’absence de mécanismes fermes de reddition de comptes pouvant en assurer l’application uniforme et efficace par les pays membres.

ECA-Watch, un réseau international d’organismes de la société civile auquel participe l’Initiative d’Halifax, ainsi qu’Amnistie internationale, sont récemment intervenus dans le processus de révision des Approches communes. Ces organismes préconisent d’élargir l’application de la Recommandation de manière à la rendre obligatoire et d’améliorer le processus d’examen par les pairs relatif au respect de la Recommandation par les OCE. De plus, ECA-Watch et Amnistie soulignent la nécessité d’améliorer la transparence de ces organismes financiers publics, notamment en améliorant la divulgation de l’information concernant les répercussions qu’ont les activités soutenues financièrement par les OCE dans les domaines environnemental, social, du travail, des droits de la personne et du développement.  

Entre-temps, le débat sur le projet de loi C-300 (voir Mise à jour, 2009, no 11) continuera lorsque le Parlement reprendra ses travaux en mars. S’il est adopté, ce projet de loi exigera de meilleures performances en matière sociale, environnementale et des droits de la personne de la part des entreprises qui bénéficient du soutien de l’organisme de crédit à l’exportation du Canada, Exportation et développement Canada.


Lettre d’OSC concernant les Approches communes (en anglais)
http://halifaxinitiative.org/content/letter-oecd-eca-watch-and-amnesty-i...  
Revoir la dette d’Haïti à la suite du tremblement de terre?
Alors même que l’attention du monde se concentrait sur les effets dévastateurs du tremblement de terre survenu ce mois-ci en Haïti, des donateurs se réunissaient à Montréal pour discuter de plans de reconstruction et, en même temps, la Banque mondiale et le FMI annonçaient l’attribution de plus de 200 millions de dollars de financement d’urgence à ce pays. Bien que de nombreux groupes aient souligné le besoin de financement immédiat et substantiel du pays, des groupes n’ont pas tardé à faire remarquer le fait que 102 millions de dollars en provenance du FMI sont consentis sous forme de prêt plutôt que de subvention, et qu’ils s’ajouteront à la dette bilatérale et multilatérale de 1,25 milliard de dollars d’Haïti. Bien qu’Haïti ait bénéficié d’une annulation de 1,2 milliard de dollars de sa dette multilatérale en juillet dernier (voir Mise à jour, 2009, no 7), le pays doit encore 650 millions de dollars à la Banque interaméricaine de développement (BID), au FMI et à la Banque mondiale. Le Venezuela, principal créancier bilatéral d’Haïti, a déjà annoncé son intention d’annuler la dette d’Haïti à son endroit, laquelle s’élève à 295 millions de dollars, et Taiwan devrait lui emboîter le pas. Au Canada, le ministre Flaherty s’est montré publiquement favorable à une annulation de dette, tandis que le FMI et le conseil de la Banque mondiale ont demandé au personnel de la Banque d’examiner les moyens de financer une telle annulation. Mais le plus grand défi sera de convaincre la BID, qui semble d’avance peu encline à laisser tomber les 447 millions de dollars qui lui sont dus.

Déclaration de la société civile au sujet de la conférence sur la reconstruction d’Haïti
http://www.ccic.ca/_files/fr/media/cso_statement_haiti_2010-01-25_f.pdf


Taxe sur les opérations financières : le débat s’anime
L’idée d’une taxe sur les opérations financières (TOF, voir « LES FAITS ») a été très présente dans l’actualité au cours des deux derniers mois. Le Premier ministre britannique Gordon Brown et le président français Nicolas Sarkozy continuent d’en prôner l’adoption. Le Parlement allemand tient des audiences sur le sujet après avoir reçu une pétition de 50 000 noms en faveur d’une telle taxe. Et le président américain Barrack Obama vient de créer une nouvelle taxe sur les banques qui, sans être tout à fait une TOF, vise à récupérer une petite partie (90 milliards de dollars) de la facture du sauvetage des banques, qui s’élève à 700 milliards de dollars de fonds publics.

Le FMI a aussi tenu des rencontres, à Washington et à Londres, avec des groupes de la société civile et des universitaires au sujet de son étude sur la taxation du secteur financier commandée par le G20. Ces rencontres répondaient à la demande de la société civile qui réclamait d’être consultée (voir Mise à jour, 2009, no 11). Entre autres interventions, le professeur français Bruno Jetin a expliqué pourquoi la TOF est un instrument si prometteur à la fois pour récupérer les coûts du sauvetage des banques et redistribuer la richesse dans le monde. Le chercheur Rodney Schmidt, de l’Institut Nord-Sud, a parlé de certaines dimensions pratiques et techniques de l’application d’une TOF, tandis que l’universitaire Stephan Schulmeister a présenté une évaluation économique des effets de la TOF sur le marché et expliqué comment elle pourrait freiner l’activité spéculative à court terme. Le FMI reçoit les commentaires du public sur cette étude jusqu’au 10 février.

Entre-temps, le ministre canadien des Finances Jim Flaherty a réitéré son opposition à une telle taxe au motif que son gouvernement n’est pas favorable aux hausses d’impôts et qu’il n’a pas eu à renflouer ses banques. Mais devant la montée en flèche du déficit fédéral et la réticence du gouvernement à hausser les impôts personnels et ceux des entreprises, une « tarification bancaire à l’endroit des banquiers » pourrait bien être actuellement la meilleure option.


Le FMI lance un appel à commentaires sur la taxation du secteur financier http://www.imf.org/external/french/np/exr/consult/2009/index.htm


Babillard – Ce mois-ci…
  • La prorogation du Parlement par le Premier ministre Stephen Harper n’aura aucune incidence sur le projet de loi C-300, Loi sur la responsabilisation des sociétés à l’égard de leurs activités minières, pétrolières ou gazières dans les pays en développement. La « bataille » reprendra au même point en mars, dès que les comités parlementaires auront été établis de nouveau.
  • Affaires étrangères et Commerce international Canada a annoncé la création du Programme de coopération pour l’investissement (PCI) doté d’un fonds de 20 millions de dollars, dont les sommes feront partie de l’aide publique au développement, qui partage certains coûts liés aux essais de faisabilité technique et de viabilité économique d’un investissement dans les pays en développement, à la démonstration et l’adaptation de technologies appropriées et à la conduite d’activités visant à réaliser des investissements. Ce programme remplace le Programme de coopération industrielle de l’ACDI qui a joué un rôle semblable jusqu’à son abolition en 2009.
  • Global Financial Integrity, un organisme qui prône l’adoption de politiques, de mesures protectrices et d’ententes multilatérales en vue de réduire le mouvement transfrontalier de fonds illégaux, a publié la « New Haven Declaration » (« Déclaration de New Haven »), entérinée entre autres par Oxfam, Human Rights Watch, Amnistie internationale et Tax Justice Network. Cette déclaration établit un lien entre les pratiques financières illicites, le secret dans les finances mondiales et leur effet négatif sur les droits de la personne. L’organisme en a profité pour lancer un nouveau site web réclamant la transparence au sein du système financier international. http://www.g20transparency.com
  • Le Conseil du FMI a terminé l’examen de ses politiques d’information du public et, tout comme la Banque mondiale (voir Mise à jour, 2009, no 10), il insiste maintenant sur la nécessité de divulguer les documents et l’information en temps opportun sauf si des raisons graves et précises vont à l’encontre d’une telle divulgation. http://www.imf.org/external/np/exr/cs/news/2010/cso110.htm
  • Le Chili est devenu le 31e membre de l’Organisation de coopération et de développement économiques et le deuxième pays d’Amérique du Sud (après le Mexique) à en faire partie. Les deux tiers des membres de l’OCDE sont des pays européens. Ni l’Inde, ni la Chine, ni le Brésil n’en sont membres.
  • Des groupes canadiens de la société civile ont publié une plateforme de demandes communes en vue des rencontres du G8 et du G20 qui se tiendront à Muskoka et à Toronto en 2010. Les demandes portent principalement sur le développement, la crise financière et les changements climatiques et contiennent des recommandations sur la transition entre le G8 et le G20. L’Initiative d’Halifax s’est exprimée lors du lancement de presse. http://www.halifaxinitiative.org/fr/content/sommet-2010-du-g8-de-muskoka...
  • La Banque mondiale et le FMI ont réduit de 1,9 milliard de dollars la dette de la République démocratique du Congo dans le cadre de l’Initiatives d’aide aux pays pauvres très endettés et de l’Initiative d’allègement de la dette multilatérale. Pour obtenir cette réduction de dette, le Congo a mis en œuvre une série de conditions relatives à la stabilité macroéconomique, la gestion des finances publiques et du secteur pétrolier, ainsi qu’une réforme de la gouvernance, la santé et l’éducation.



Nouvelles publications ce mois-ci

  • Countering Illicit and Unregulated Money Flows - Money Laundering, Tax Evasion and Financial Regulation, Transnational Institute, Debate Papers (documents de discussion), décembre 2009. http://www.tni.org/sites/tniclone.test.koumbit.net/files/download/crime3...  
  • Capital Controls and 21st Century Financial Crises: Evidence from Colombia and Thailand, Bruno Coelho et Kevin P. Gallagher, PERI, document de travail no 213, janvier 2010.



Événements à venir

  • Réunion des ministres des finances du G7 et des gouverneurs des banques centrales, Iqaluit (Nunavut), Canada, 5 et 6 février.



LES FAITS - La taxe sur les opérations financières (TOF) en 5 questions

  • Quoi? La TOF est une taxe infime qui serait prélevée sur toutes les transactions des marchés financiers (et non strictement sur les échanges de devises, comme le ferait une taxe sur les opérations monétaires). Elle s’appliquerait aux transactions financières effectuées par l’entremise des marchés boursiers, des marchés à terme ou de tout autre mécanisme établi par les intervenants sur les marchés financiers dans le but de réaliser des opérations financières.
  • Qui? La TOF s’appliquerait aux opérations sur les titres, les obligations, les devises étrangères et les instruments dérivés (y compris le commerce de contrats à terme et d’options ayant trait aux titres, aux dérivés de taux d’intérêt, aux devises et aux matières premières). Elle ne s’appliquerait pas maintenant à ces mêmes instruments financiers négociés dans un contexte de commerce bilatéral (opérations « hors cote » ou « hors bourse » (OTC)), ces transactions étant effectuées sans supervision ni surveillance réglementaire. Cette situation pourrait changer si des pressions étaient exercées pour que l’inscription de ces transactions hors cote devienne obligatoire et qu’à long terme, la taxe soit appliquée à ces transactions également afin d’éviter un déplacement des transactions vers le marché non réglementé. Les transactions de consommateur courantes telles que les paiements contre produits, les chèques de paye et les envois d’argent transfrontaliers ne seraient pas assujettis à la TOF. Les prêts interbancaires à court terme et les opérations des banques centrales seraient aussi exclus de l’application de la TOF.
  • Pourquoi?
    • Revenu – Comme elle couvre différents instruments financiers, même une taxe minime permettrait de générer des sommes considérables qui pourraient servir à financer des programmes de relance tant au Nord qu’au Sud, au moment où les dettes et les déficits publics croissent à vue d’œil, et contribuer à combler l’insuffisance des fonds pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement ainsi que pour atténuer les changements climatiques et s’y adapter.
    • Fiabilité du financement du développement – Après les premières années, et lorsque le marché aura réagi à l’introduction de la taxe, il deviendra relativement simple de prédire le montant des revenus générés, ce qui permettra aux gouvernements de mieux planifier à long terme.
    • Freiner l’investissement spéculatif – Une TOF de 0,05 pour cent, par exemple, serait assez minime pour ne pas avoir d’incidence sur l’investisseur individuel occasionnel, mais assez élevée pour freiner les opérations spéculatives à court terme effectuées par des opérateurs au jour le jour qui peuvent parfois négocier les même produits jusqu’à cinq fois dans une même journée.
    • Justice – Une taxe sur les opérations financière est une mesure d’équité politique et de justice sociale. Une telle taxe permettra de faire porter le fardeau de la résolution des crises au secteur financier plutôt qu’à la population en général, de taxer le capital plutôt que les salaires et la consommation, en somme, de rendre le système fiscal plus équitable.
  • Comment? L’argent serait perçu sur les différents marchés boursiers où s’effectuent les opérations au moyen des systèmes de règlement informatisés utilisés dans toutes les bourses importantes (il en va de même pour la perception de la taxe sur les opérations hors bourse). Idéalement, la TOF serait mise en place à l’échelle mondiale, mais rien n’empêche un ou plusieurs pays de percevoir une telle taxe unilatéralement. Le Royaume Uni impose déjà un droit de timbre sur titres de 0,5 %.
  • Combien? Le Austrian Institute for Economic Research a estimé qu’une TOF mondiale de 0,05 % pourrait rapporter entre 447 et 1022 milliards $ par année, même en partant de l’hypothèse d’une réduction draconienne de 65 % de l’activité des marchés. Même une diminution de 50 % des échanges permettrait de générer des revenus annuels supérieurs à l’aide au développement.