Présentation devant le CPAEDI sur le Sommet du G8 / G20 qui se tiendra en 2010

Présentation portant sur les principes directeurs d’un G20 plus démocratique, représentatif et responsable

par Fraser Reilly-King, Coalition de l’Initiative d’Halifax

le 29 octobre 2009

Tout d’abord, je désire vous remercier de nous avoir invités à comparaître devant le Comité permanent pour parler de questions relatives au Sommet du Groupe des Huit et du Groupe des Vingt qui se tiendra à Huntsville, Ontario, en juin 2010.

Je m’appelle Fraser Reilly-King et je suis coordonnateur de l’Initiative d’Halifax, une coalition de dix-neuf organismes œuvrant dans les domaines du développement, de l’environnement, de la foi, des droits de la personne et du travail. Depuis les quinze dernières années – en fait, depuis la période qui a précédé immédiatement le Sommet du Groupe des Sept tenu à Halifax en 1995 – nous nous sommes concentrés sur les activités et les politiques de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international et des organismes de crédit à l’exportation, en essayant de cerner les lacunes de leurs politiques et de leurs pratiques, dans le but de combler celles-ci et d’améliorer la responsabilité et la transparence de ces institutions.

Notre organisme est aussi membre du Comité de coordination de la société civile canadienne pour le G8 de 2010, qui est chargé d’élaborer le document cadre dont ma collègue vous présentera une vue d’ensemble.
Avant de laisser place à ma collègue qui vous présentera cet aperçu, je voudrais vous exposer le contexte dans lequel se tiendront les sommets du G8/G20 de 2010, particulièrement en ce qui a trait aux structures qui régissent l’économie mondiale.

Au cours des deux dernières années, bien des pays dans le monde ont été secoués par une série de crises ininterrompue et interconnectée : crises alimentaire, énergétique, financière et climatique. Aucun pays n’a été épargné. Et personne n’aurait pu prévoir ni même imaginer l’ampleur de chacune de ces crises.

Les leaders mondiaux ont réagi en convoquant les Sommets du G20 de Washington, Londres et Pittsburgh afin de contrer ces crises. Parallèlement, les Nations Unies ont entrepris de former une Commission d’experts – dirigeants de banques centrales, ministres des finances et universitaires de partout dans le monde – ayant pour mandat d’élaborer un ensemble de propositions visant à repenser l’architecture financière mondiale et informer la conférence de l’ONU de juin 2009 sur la crise financière et économique mondiale.

Le mois dernier, les chefs d’État réunis à Pittsburgh ont annoncé que le G20 deviendrait le principal forum mondial de discussion économique et financière. Fait important pour le Canada, le Premier ministre Stephen Harper a également annoncé qu’il coprésiderait, avec la Corée du Sud, la prochaine rencontre du G20 qui se tiendra en juin 2010, en plus d’un Sommet du G8 abrégé. De nombreux observateurs considèrent le G20 comme une avancée positive, étant plus inclusif que le G8.

Les pays du G20 représentent 65 pour cent de la population mondiale et 85 pour cent du produit national brut de l’ensemble des pays du monde. Le G20 réunit des économies émergentes clés, telles que le Brésil, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, ainsi que d’autres acteurs importants, comme le Mexique, l’Argentine, l’Indonésie, l’Arabie saoudite, la Corée du Sud et la Turquie. Mais le G20 exclut également 173 pays. Il ne se trouve pas un seul pays à faible revenu ou moins avancé dans le groupe. Pas un seul État fragile. L’Union africaine est écartée. De ce point de vue, le G20 n’est ni inclusif, ni légitime, ni crédible. De plus, le G20 – tout comme son prédécesseur, le G8 – demeure largement non transparent et non comptable.

Nous devons donc veiller à ne pas figer cette nouvelle institution ni ses membres dans un moment historique du temps – ce qui vaut pour 2009 vaut également pour 2029. Pensons seulement au Conseil de sécurité des Nations Unies.

Alors, qu’en est-il? Venons-en au Sommet du G20 qui se tiendra l’an prochain. Le Canada pourrait y jouer un rôle d’une extrême importance en amorçant avec d’autres pays un processus visant à transformer la structure actuelle du G20 pour en faire un forum qui soit un exemple de démocratie et de transparence en matière de politiques et de prise de décision et qui constitue le coup d’envoi d’une nouvelle ère de coopération multilatérale. Quels sont les principes que devrait rechercher le gouvernement? Nous proposons ce qui suit :

  • Limité en nombre mais représentatif dans sa composition – Un « G20 », en principe, n’est pas une mauvaise idée. Au cours des dernières années, divers intervenants ont souligné la nécessité d’un Conseil mondial pour gouverner l’économie mondiale. La Commission de gouvernance globale de 1995, le président mexicain Ernesto Zedillo, le président français Jacques Chirac et jusqu’à la récente Commission d’experts de l’ONU sur la crise financière et économique mondiale ont avancé une telle idée. Mais un forum de leaders mondiaux triés sur le volet par les puissants ne bénéficiera jamais d’une crédibilité mondiale ou publique. Un tel forum devrait plutôt réunir de 20 à 29 pays et inclure des représentants désignés par les membres d’organismes multilatéraux régionaux, dont les porte-parole se relaieraient périodiquement.
  • Inclure les pays les plus démunis – Le Brésil, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud ont émergé et sont devenus d’importants nouveaux acteurs. Cependant, on ne peut pas penser que l’Afrique du Sud peut légitimement discuter des problèmes de l’Afrique subsaharienne. Les réalités et les besoins politiques et économiques de l’Afrique du Sud sont très différents de ceux des pays dont l’économie est moins diversifiée. Ces économies se caractérisent par des taux d’endettement élevés, une gamme restreinte d’exportations, une faible base industrielle, une forte population rurale, une importante dépendance aux ressources extérieures telles que l’aide internationale, ainsi qu’une faiblesse en matière de gouvernance et de système de réglementation. L’inclusion de ces pays influerait nécessairement sur le programme et les solutions élargies qui s’imposent. En mettant en place un forum plus représentatif, comme celui qui est proposé ici, le Canada ouvrirait la voie à l’établissement d’un programme d’action plus exhaustif.
  • Donner une voix à la société civile – Les acteurs non gouvernementaux jouent un rôle de plus en plus important au sein des organisations multilatérales. Des analyses, des critiques, des propositions et des protestations de la société civile ont eu des effets positifs en permettant aux gouvernements de mieux comprendre les problèmes, les méthodes de travail et les programmes d’action. Faire place à la participation de la société civile est un élément clé du processus démocratique et a fini par devenir un élément central des discussions au sein de divers forums. L’officialisation d’un processus de participation de la société civile au sein du G20 constituerait un important pas en avant. On pourrait ainsi former des groupes d’experts composés d’intervenants de divers horizons qui seraient habilités à faire des représentations formelles au G20 pour examen, ou encore lancer une consultation canadienne et un débat parlementaire en préparation de la rencontre prévue pour l’an prochain.
  • Transparence du processus et obligation de rendre compte des décisions – Curieusement, la crise financière – une crise dont on peut relier les origines à un manque de transparence des institutions financières – a redonné de la vigueur à un ensemble d’institutions qui ne pratiquent ni la transparence ni la reddition de comptes. Un G20 constitué de chefs d’État ou de gouvernements devrait publier son ordre du jour et la documentation connexe sur des sites web publics en préparation de leurs rencontres. Il constituerait aussi un premier pas vers un processus vraiment représentatif de rencontre au sommet des leaders dans le cadre des Nations Unies – qui renforcerait ce système multilatéral élargi. Ainsi, les rapports de discussion du G20 pourraient faire avancer les travaux de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social des Nations Unies.

En l’absence de telles modifications, le G20 risque fort de perdre sa crédibilité et sa légitimité aussi rapidement qu’est réapparu le besoin de son existence. Pendant cette importante période de transition, un leadership fort de la part Canada pourrait contribuer à redresser cette situation.


Présentation portant sur le Sommet 2010 du G8 de Muskoka : Un programme pour le développement mondial

par Amanda Sussman, Plan Canada, de la part du Comité de coordination de la société civile pour le sommet du G8/G20 en juin 2010

Bonjour. Permettez-moi d'abord de vous remercier de cette occasion qui m'est donnée de me présenter devant ce Comité et soyez assurés que je vais m’efforcer d’utiliser au mieux ce temps qui est précieux.  

Je m’appelle Amanda Sussman et je représente aujourd’hui, ici, le Comité de coordination de la société civile pour le sommet du G8/G20 en juin 2010, une initiative impliquant plus de 100 organisations et associations d’organisations canadiennes, elles-mêmes soutenues par des milliers de Canadiens à travers tout le pays.  J’exerce également la fonction de conseillère auprès de Plan International Canada, l’une des agences de développement les plus anciennes et les plus répandues dans le monde, implantée dans 66 pays.

Aujourd’hui, j’aimerais vous donner un aperçu de l’importante initiative que ce Comité a commencé à préparer en février dernier, en prévision de la présidence canadienne du G8.

Tout d’abord, nous nous sommes penchés sur ce qui avait fonctionné et ce qui n’avait pas fonctionné à Kananaskis, lorsque le Canada avait accueilli le Sommet du G8 en 2002. Tandis que des dizaines d’organisations s’impliquaient alors dans des campagnes publiques et mettaient en œuvre différentes méthodes, allant d’un engagement constructif avec le gouvernement à des actions de rue à l’extérieur du Sommet alternatif de Calgary, il était clairement apparu qu’aucun ensemble de recommandations, visant à communiquer aux décideurs et au public les attentes de la société civile et le consensus le plus large sur lequel les leaders politiques auraient pu enclencher leurs actions, n’avait été articulé ni présenté au gouvernement.

Aujourd’hui, les organisations abordent la situation d’une manière complètement différente. Le document que nous vous avons soumis, intitulé « An Agenda for Global Development » est le résultat d’un processus détaillé par lequel de nombreux groupements d’organisations très diverses se sont accordés sur trois thèmes fondamentaux et interdépendants devant demeurer au cœur de l’agenda 2010 : la lutte contre la pauvreté, la transformation du système économique et financier mondial et la concrétisation des progrès dans la lutte contre les changements climatiques. Sur ces trois thèmes, des dizaines d’organisations ont élaboré un ensemble précis de recommandations stratégiques pour le gouvernement, qui sont spécifiques, mesurables, réalisables, réalistes et qui peuvent être mises en œuvre du point de vue du gouvernement.

Par exemple, les recommandations sur la santé de la mère et de l’enfant sont le reflet des compétences collectives des cinq organisations canadiennes de développement les plus importantes qui travaillent en collaboration avec les groupes pour la protection des citoyens et des droits de la personne et qui ont des dizaines d’années d’expérience sur le terrain dans ce domaine partout dans le monde. De la même façon, les recommandations en matière de sécurité alimentaire sont le fruit du travail du Groupement stratégique en sécurité alimentaire (Food Security Policy Group), une association regroupant 35 associations en agriculture et en développement à travers le pays, qui partagent leurs compétences et leurs expériences en tant qu’intervenants de première ligne dans le domaine de la sécurité alimentaire, aussi bien au Canada qu’à l’étranger. Ces deux regroupements sont deux des nombreux autres regroupements d’associations qui ont travaillé à l’élaboration de ce document.

Il me faut souligner que ces recommandations ne sont pas uniquement soutenues par les organisations canadiennes. Ces trois derniers jours à Ottawa, le Comité a tenu une assemblée mondiale d’organisations de citoyens qui ont travaillé sur les agendas du G8/G20 dans le monde. Il est ressorti de nos discussions que toutes les recommandations énumérées dans ce document, qui ont reçu un large appui et reflètent un consensus international, seront communiquées aux autres chefs de gouvernement du G8 et du G20.

Sur le thème de la pauvreté, le Comité canadien a commencé par se poser une question très concrète : quels sont les progrès réalistes que le G8 pourrait accomplir en 2010, sachant que c’est un organisme politique œuvrant à court terme et ne disposant pas d’une capacité institutionnelle lui permettant de mettre en œuvre des initiatives sur le long terme ? Les recommandations sont ainsi orientées principalement sur ce que le Canada peut faire, en tant qu’hôte du G8, pour remettre les Objectifs du Millénaire (ODM) sur les rails. Les ODM représentent un accord d’engagement des leaders mondiaux sur un ensemble d’objectifs internationaux pris lors des sommets internationaux des années 90. Huit objectifs couvrent les problèmes principaux les plus urgents, allant de la pauvreté et de la faim à la lutte contre le VIH/sida et à l’éducation, et définissent les résultats spécifiques qui doivent être atteints d’ici 2015.

Il est évident que 2010 sera une année charnière pour le Canada et pour le monde. Nos décisions en matière de réforme économique et de changements climatiques détermineront la réussite qui couronnera les efforts du monde visant à réduire la pauvreté et le réchauffement climatique pour les générations à venir. En tant qu’hôte du prochain sommet du G8, le Canada se trouve devant deux choix et peut faire la différence : il peut soit reléguer ces aspirations à un vague espoir distant, soit confirmer la sérieuse possibilité d’atteindre réellement ces objectifs pendant le temps qu’il reste à vivre à notre génération.  

Les Canadiens portent fièrement le drapeau de leur pays tout autour du globe en le brandissant comme un symbole de la démocratie du Canada, de son ouverture et de son intérêt pour les droits de la personne. Cependant, nos formidables contributions du passé sont assombries par l’inquiétude concernant le rôle actuel du Canada dans les négociations relatives aux changements climatiques, à la réforme de l’économie internationale et à la pauvreté dans le monde. Lorsque les chefs de gouvernement du monde entier se rassembleront pour le G8 et le G20 en 2010, le Canada aura une occasion en or pour réaffirmer notre réputation internationale en tant que leader mondial et promouvoir nos valeurs dans le monde.   

Je tiens tout autant à souligner que nous avons fait de remarquables progrès, et que, dans de nombreux cas, l’argent a été bien dépensé. Les investissements du passé pour contribuer à réduire ces problèmes ont abouti à de formidables résultats, notamment dans la lutte contre le VIH/sida, l’éducation et l’immunisation, pour n’en mentionner que quelques uns. Rien qu’en Afrique, les citoyens ont pu bénéficier de l’Aide officielle au développement qui a fourni des traitements contre le sida à près de 3 millions de personnes, réduit considérablement le taux de mortalité dû à la malaria et aidé 34 millions d’enfants de plus à prendre le chemin de l’école.   

L’année 2010 aura ceci d’unique que les causes de la plupart des défis qui font l’objet de ce document sont aujourd’hui bien comprises et leurs solutions bien connues. Plutôt que de fixer des objectifs trop difficiles à atteindre, ce document met en lumière les étapes réalistes que le Canada peut franchir pour catalyser les progrès sur les problèmes mondiaux les plus urgents et pour promouvoir un nouveau modèle de globalisation socialement responsable, économiquement durable et environnementalement équitable.

Aujourd’hui, nous cherchons à initier un dialogue constructif et efficace entre le gouvernement canadien et ses citoyens, fondé sur les pratiques exemplaires décidées lors de sommets précédents par le passé. Il sera essentiel que ce Comité joue un rôle important en tant que véhicule des différents intervenants canadiens, qu’ils proviennent des secteurs privés ou des secteurs à but non lucratif, en organisant un ensemble d’audiences dans les agendas du G8 et du G20. Le processus n’a nul besoin d’être onéreux pour être efficace. Il peut consister, par exemple, de six audiences dont deux à Ottawa et quatre dans les régions clés du pays, cumulant clairement leurs recommandations précises dans un seul rapport au gouvernement. Ces audiences pourraient constituer les actions engagées par les Parlementaires avec leurs citoyens sur ces questions clés, lorsque les leaders mondiaux se rassembleront au Canada.

Au-delà de ce Comité, les pratiques exemplaires initiées lors de sommets précédents comprennent un dialogue élargi entre le gouvernement et la société civile, à une échelle mondiale, connu sous le nom de dialogue « Civil/G8 ». Nous espérons que le Comité jouera un rôle actif pour contribuer à élargir ce dialogue et nous avons hâte de travailler avec vous, ensemble, à la mise en œuvre de cette importante initiative.